Monsieur,
À l’occasion de votre 74e anniversaire de naissance, le 2 avril, je vous écris pour vous souhaiter un joyeux anniversaire. J’espère sincèrement qu’une libération inconditionnelle vous sera accordée avant votre 75e anniversaire de naissance…
Depuis que j’ai vu, il y a quelques années, le film Fedayin, le combat de Georges Abdallah, je milite à Montréal, au Québec, pour votre libération inconditionnelle. D’ailleurs, à Palestiniens et Juifs Unis (PAJU.org), organisation dont je suis membre, nous sommes indignés par votre incarcération. De plus, nous sommes outrés par sa durée: quatre décennies d’emprisonnement ! Nous avons organisé (et continueront d’organiser) des activités publiques pour sensibiliser nos concitoyens et concitoyennes sur l’injustice qui vous échoit.
Sauf erreur de ma part, la France vous libérerait si vous signez un document acquiesçant, en somme, que vous êtes un terroriste. Vous refusez toutefois de signer ce document, et la raison de votre refus, la raison que vous invoquez, c’est que vous n’êtes pas un terroriste. Eh bien, vous avez parfaitement raison ! Vous n’êtes pas un terroriste ! Vous êtes, comme vous le dites si bien, un combattant, un combattant arabe ! Vous avez donc parfaitement raison de refuser de signer ce document ignominieux.
À mes yeux, votre refus de signer ce document donne raison à ceux et celles qui vous appellent le Nelson Mandela arabe. Rappelons que Mandela fut emprisonnée par le régime d’Apartheid sud-africain pendant 27 ans. Rappelons aussi que le gouvernement sud-africain, confronté aux appels de libération de Mandela, disait qu’il libérerait le Prisonnier Mandela, mais à condition qu’il renonce à la violence. Mandela tint bon et refusa de renoncer à la lutte armée… De la même façon, vous tenez bon et refusez de discréditer le combat pour la dignité arabe. Par principe, vous refusez d’échanger vos convictions politiques contre votre libération individuelle. Vous êtes un homme de principe, un véritable modèle d’intégrité.
Autrefois, vous étiez instituteur au Liban. Mais d’une certaine manière, vous n’avez jamais cessé d’enseigner… En tant qu’instituteur, votre enseignement rejoignait quelques dizaines d’écoliers et d’écolières, peut-être quelques centaines. Aujourd’hui, votre enseignement en matière de soumoud, de persistance, de tenir bon, inspire non seulement la jeunesse libanaise, mais aussi la jeunesse arabe, et même la jeunesse internationale ! En fait, votre soumoud inspire plusieurs générations de militants et militantes, arabes ou non, qui malgré les nombreux reculs récents et déprimants (génocide à Gaza, pogroms en Cisjordanie, étêtement du Hezbollah, vacillement en Syrie), tiennent bon, précisément, dans la lutte contre l’impérialisme, le colonialisme et le sionisme. C’est certainement mon cas : lorsque j’éprouve une difficulté, je pense à votre force morale, et cela m’aide à surmonter les obstacles que je vis.
Rachel Corrie (https://rachelcorriefoundation.org/) est, pour moi, une autre grande source d’inspiration. Cette Américaine fut écrasée délibérément par un bulldozer israélien en 2003, alors qu’elle tentait d’empêcher la démolition de la maison d’une famille palestinienne de Rafah, à Gaza. Le prénom de ma fille (née en 1998), c’est Sabrina, et elle porte très bien son prénom. Mais si c’était à refaire, je nommerais ma fille Rachel, en hommage à Rachel Corrie…
Quant à mon fils (né en 2001), son prénom, c’est Joseph. Lui aussi porte très bien son prénom, mais si c’était à refaire, je nommerais mon fils Georges Ibrahim, pour vous rendre hommage…
Joyeux 74e anniversaire de naissance. Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de mon respect infini et de ma reconnaissance inépuisable.