La Cour pénale internationale a récemment émis un mandat d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant et le chef du Hamas Mohamed Deif. Suite à la décision de la CPI, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a déclaré qu’il n’y avait aucune équivalence morale entre Netanyahu et le Hamas. S’il veut dire qu’il n’y a pas d’équivalence morale entre l’oppresseur et l’opprimé, il a tout à fait raison : la justice est du côté de l’opprimé, et l’histoire montre clairement que depuis des décennies, c’est Israël qui est l’oppresseur, et non l’opprimé.
Le Hamas a pris pour cible des civils en octobre 2023, et c’est bien sûr une ligne rouge à ne pas franchir. Il convient de noter qu’une telle violence ne surgit pas du vide. 76 ans d’oppression sous un régime d’apartheid israélien et 17 ans de blocus illégal et immoral de Gaza avec les conditions de vie misérables auxquelles ce blocus a soumis les Gazaouis, les attaques meurtrières israéliennes contre les civils et les infrastructures palestiniens en 2008 et 2014 à Gaza sont au cœur de la violence, et non l’inverse. Si la mort de ces citoyens israéliens tués le 7 octobre 2023 ne peut être tolérée, 76 ans de nettoyage ethnique et de colonisation illégale expliquent la violence. Ce qui se passe aujourd’hui à Gaza est un génocide classique que vous, Monsieur Trudeau et votre gouvernement continuez de refuser de reconnaître.
Mohammed Deif pourrait aller à La Haye et demander des circonstances atténuantes. Pour Netanyahou, en revanche, il n’y a aucune raison de demander la clémence de la Cour. Il est à ce jour le criminel de guerre le plus notoire du XXIe siècle. Au milieu des années 1970, les Palestiniens sous Yasser Arafat ont accepté de construire un État indépendant sur seulement 22 % de la Palestine historique, présentant ainsi un compromis historique mais douloureux en échange d’une vie collective nationale dans un État palestinien viable. Ils l’ont fait sur la base du droit international. Le Hamas a rejoint il y a longtemps ce consensus palestinien (appelons-le le compromis 78 %/22 %), même si les médias occidentaux présentent un récit différent. Toute la carrière politique de Netanyahou (il est le Premier ministre ayant exercé le plus longtemps dans l’histoire d’Israël) a été centrée sur le rejet du principe d’un État palestinien indépendant et viable.
Selon Netanyahou, 100 % de la Palestine appartient à Israël. En raison de contraintes juridiques et de relations publiques, Netanyahou ne peut pas revendiquer immédiatement 100 % du territoire. Les Palestiniens sont donc autorisés à vivre dans une cage de fer fournie par l’État sur moins de la moitié des 22 % avec lesquels ils étaient prêts à former un État, mais ils sont « libres » de quitter leur cage à tout moment, à condition d’accepter d’aller en Jordanie (par exemple) et de ne jamais revenir. Au fil du temps, conformément au plan établi par Netanyahou et ses prédécesseurs, les Palestiniens dépériraient et la cage de fer ne serait plus nécessaire. 100 % du territoire serait ainsi nettoyé des « indésirables ethniques » (comme l’a fait le Canada en plaçant les Premières Nations dans des réserves qui ont servi de modèles aux régimes d’apartheid d’Afrique du Sud et d’Israël), ce qui permettrait la possession exclusive du territoire palestinien par le groupe ethnique « désirable ».
Justin Trudeau a le choix : se ranger du côté de l’oppresseur moralement défaillant ou du côté de l’opprimé moralement intègre. Entre l’oppression menée par Netanyahou et la résistance à l’oppression menée par les groupes de résistance palestiniens (l’OLP dans le passé, le Hamas aujourd’hui), il n’y a pas d’équivalence morale. Prétendre le contraire est moralement intenable, c’est l’apanage des hypocrites et des lâches. Vous, M. Trudeau, êtes du mauvais côté de l’histoire. Ce n’est pas vraiment un héritage à laisser, n’est-ce pas ?
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