par Denis Kosseim and Chadi Marouf
En ce 14 juillet, jour de Fête nationale en France, nous souhaitons parler d’un instituteur libanais : Georges Ibrahim Abdallah.
En 1982, des événements au Liban qui choquèrent profondément Georges, âgé de 31 ans à l’époque. Le contexte, c’était l’invasion israélienne du Liban. De connivence avec l’armée israélienne, une milice libanaise (les Phalanges libanaises, ou Kataëbs) entrèrent dans deux camps de réfugiés adjacents dans le sud de Beirut : les camps de Sabra et Chatila.[1] Sous les ordres du commandant de la milice, Elie Hobeika, les Phalangistes massacrèrent les habitants sans défense. Après 36 heures de carnage, la quasi-totalité de la population des camps avait été tuée. À la fin du compte, c’est près de 3500 civils (surtout des Palestiniens et des Libanais) qui furent tués. L’armée israélienne avait facilité le massacre : à la tombée de la nuit, le commandant israélien, Ariel Sharon, fit éclairer les camps. À la tombée de la deuxième nuit du massacre, Sharon fit à nouveau éclairer les camps. Pas moyen de se cacher, pas moyen d’échapper au carnage…
Georges, un chrétien maronite, fut horrifié par ces événements. Il ne pouvait pas laisser tomber, passer outre et oublier. Il décida de lutter, mais sans se limiter au Liban. Il se rendit donc en Europe. En 1984, il fut arrêté et emprisonné en France. En 1987, il fut condamné à vie pour complicité dans l’homicide d’un diplomate israélien et d’un colonel américain (les États-Unis étaient impliqués dans la guerre du Liban et dans l’occupation du Liban).
Aujourd’hui, Georges est un jeune septuagénaire, ayant passé presque quatre décennies dans les geôles françaises comme prisonnier politique. Lors de son procès, il avait dit : « Je suis un combattant, pas un criminel (…) La voie que j’ai suivie m’a été imposée par les atteintes aux droits de l’homme perpétrées contre les Palestiniens ». Bien que Georges soit libérable depuis longtemps, la libération conditionnelle lui est systématiquement niée. Tout semble indiquer qu’il mourra en prison. La libération conditionnelle est, semble-t-il, interdite pour les prisonniers politiques.
Naguère, Nelson Mandela était un prisonnier politique. Sans la campagne internationale qui exigeait sa libération, Mandela aurait trépassé en prison. Le gouvernement sud-africain affirmait à l’époque qu’il libèrerait Mandela, mais à condition qu’il exprime ses remords et qu’il s’engage à se tenir (politiquement) à carreau. Mandela refusa de céder. De la même manière, Georges serait libéré s’il condamnait ses actes et se tenait à l’écart de l’arène politique, mais il ne se voit pas seulement en tant qu’individu. Il se voit comme étant le représentant d’un peuple dans sa lutte pour la liberté et la dignité.
Pour Georges, ce serait un compromis inacceptable que d’« avouer ses fautes » en échange d’une libération conditionnelle. Ce serait une compromission. S’il cédait, Georges ne serait plus derrière les barreaux, mais il s’emprisonnerait lui-même. Malgré le poids de quatre décennies d’incarcération, la détermination inébranlable de Georges fournit à tous et à toutes un modèle hautement inspirant de lutte pour la liberté et la dignité. La salle de classe de cet instituteur est désormais globale…
Aujourd’hui, on célèbre en France la fête nationale. Mais quelle célébration globale ce serait si la pression internationale forçait la France à libérer Georges Ibrahim Abdallah! À l’occasion de la fête nationale de la France, célébrons la détermination inébranlable de Georges à s’accrocher aux principes fondamentaux et non négociables. Célébrons Georges Ibrahim Abdallah : un véritable combattant arabe pour la dignité humaine! Libérez le Nelson Mandela arabe! Libérez Georges Ibrahim Abdallah!
[1] https://www.sciencespo.fr/mass-violence-war-massacre-resistance/fr/document/sabra-and-chatila.html