18 Mai, 2024

Des livres, pas des bombes – Le tribunal rejette l’injonction de McGill contre le campement, soulevant la question: à qui appartient l’université?

The Superior Court rejected a request for an injunction presented by McGill University to force the dismantling of the student encampment. The action is part of an international protest movement on university campuses, in solidarity with Palestine and against the ongoing genocide
PAJU

Cette semaine, la Cour supérieure a rejeté une demande d’injonction présentée par l’Université McGill pour forcer le démantèlement du campement étudiant. Depuis près d’un mois maintenant, les étudiant.e.s mènent un campement de protestation pacifique pour exiger que l’Université mette fin à ses liens académiques et financiers avec le régime génocidaire israélien. L’action s’inscrit dans un mouvement de protestation international sur les campus universitaires, en solidarité avec la Palestine et contre le génocide en cours.

Le rejet de la demande de McGill fait suite au rejet, il y a deux semaines, d’une autre demande d’injonction de deux étudiants sionistes (dont l’un est un ancien soldat de Tsahal) qui alléguaient que le campement créait un climat hostile sur le campus. La Cour supérieure du Québec avait conclu que la preuve présentée ne prouvait pas que les manifestations avaient créé un tel climat, ni que les étudiants sionistes à l’origine de la revendication avaient été visés par des gestes et des paroles pouvant leur faire craindre pour leur sécurité.

Cette fois-ci donc, c’était l’Université elle-même qui s’impatientait, agacée par la persistance d’une manifestation pacifique sur une petite partie de son terrain, face à la rue Sherbrooke. En fait, l’empilement de tentes occupe l’espace normalement utilisé pour les cérémonies de remise des diplômes et de fin d’année scolaire. Selon McGill, il est dommage de ne pas pouvoir utiliser ces terrains pour des célébrations tranquilles – alors que depuis sept mois, les bombes pleuvent sur Gaza, des bombes et des armes qui, de toute évidence, sont développées avec le soutien d’institutions universitaires comme McGill.

Une coalition croissante de groupes s’est mobilisée pour soutenir le campement étudiant

Lorsque la demande a été déposée le vendredi 10 mai, 2024, McGill a répertorié les accusés comme étant « John Doe et Jane Doe » car, a-t-elle soutenu, elle n’a aucune idée de l’identité des manifestant.e.s. Cependant, plusieurs groupes impliqués dans le campement ou qui le soutiennent, dont l’Association des professeurs de droit de McGill (AMPL), la Société des étudiants de l’Université McGill (SSMU), Independent Jewish Voices (IJV) ainsi que Palestiniens et Juifs Unis, ont demandé le statut d’intervenant et ont été acceptés par le juge car certains de leurs membres participent et s’impliquent au sein du campement.

Représentant le PAJU, l’avocat reconnu en matière constitutionnelle et de droits humains, Me Julius Gray a déclaré que « le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique doit recevoir un poids important compte tenu de la nature de la propriété. Il a ajouté qu’une université ne peut pas être comparée « à la maison ou au salon de quelqu’un ».

Les étudiant.e.s et les groupes de la société civile ont l’intention de continuer à soutenir les courage étudiant et les campements qui se dressent contre le génocide à Gaza commis par un gouvernement israélien corrompu et instable.

Me Julius Grey
Me Julius Grey, pour Palestiniens et Juifs Unis durant la mêlée médiatique après l’audience.

Les campements s’étendent à travers le Québec

Dans une autre démonstration de solidarité, les étudiant.e.s de l’UQAM se sont joints au mouvement en installant un autre camp au cœur du centre-ville de Montréal, au Pavillon des Sciences de l’UQAM, le dimanche 12 mai. Même l’étudiant innu Xan Choquet s’est joint à l’initiative. Dans une entrevue avec APTN, l’étudiant a déclaré: « Je pense que nous devons réaliser, en tant qu’Autochtones, l’importance de la solidarité entre les différentes nations autochtones », a déclaré Choquet, originaire de Mashteuiatsh. « Je veux rappeler aux gens que les Palestinien.ne.s sont autochtones sur leur terre. Et ils vivent un génocide. Nous sommes toujours dans un génocide. Nous l’avons vécu. »

Le groupe à l’origine du campement, Solidarité pour les droits Humains des Palestiniennes et Palestiniens (SDHPP-UQAM), exige le retrait de la demande d’injonction de McGill, un boycott académique contre Israël de toutes les universités québécoises, la divulgation publique de toutes les collaborations et liens de l’UQAM avec Israël, le désinvestissement total des entreprises ayant des liens avec Israël et l’abolition du bureau Québec-Israël.

Peu de temps après que l’initiative soit devenue virale, dans un communiqué par courriel, la porte-parole de l’UQAM, Jenny Desrochers, a déclaré que l’université n’avait aucun investissement dans les fabricants d’armes et avait adopté une politique d’investissement responsable, ajoutant que l’UQAM n’avait pas non plus d’ententes d’échange d’étudiants ou d’ententes générales avec des universités israéliennes.

Ironiquement, peu de temps après l’annonce de l’UQAM, Paul Hirschson, consul général d’Israël, a déclaré sur X qu’il avait rencontré plus d’une fois la haute direction de l’UQAM.

Ce n’est là qu’un exemple parmi d’autres des raisons pour lesquelles les étudiant.e.s exigent que leurs universités révèlent leur collaboration et leur coopération avec le régime génocidaire israélien.

Quelques jours plus tard, les étudiant.e.s de l’Université de Sherbrooke ont également commencé un nouveau campement étendant l’appel à la solidarité avec Gaza et l’appel à la responsabilité sur les campus universitaires quant à leur collaboration avec le régime génocidaire israélien.

Des livres, pas des bombes, un appel mondial au désinvestissement

Sur de nombreux campus universitaires en Amérique du Nord, la guerre est plus proche qu’on pourrait l’imaginer. Les universités investissent des milliards de dollars dans la recherche et le développement de machines de guerre. Avec les initiatives de campement, les étudiant.e.s et les campeurs exigent de leurs institutions qu’elles :

  • divulgent tous leurs investissements ;
  • mettent fin à tout investissement qui soutient l’armée israélienne ; et
  • coupent les liens avec le régime génocidaire israélien

Jusqu’à présent, la plupart des universités déclarent qu’elles ne peuvent pas divulguer leurs investissements. Elless affirment qu’elles n’ont « aucune participation directe » dans les portefeuilles israéliens en temps de guerre qui pourraient contrarier les manifestant.e.s. La plupart des universités affirment également qu’elles n’adopteront pas de position « sociale ou politique » en mettant fin aux investissements en Israël.

Comme l’a déclaré Bruce Katz, coprésident du PAJU : «Malheureusement, les administrations universitaires ont toujours été du mauvais côté de l’histoire, que ce soit en ce qui concerne les droits des autochtones ou la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. L’histoire de l’Université McGill est honteuse et cette fois-ci, ce n’est pas différent. Les étudianté.e.s, les professeur.e.s et la société civile doivent être leur boussole morale.»

Cependant, les étudiant.e.s, en agissant sur leurs campus contre le génocide, nous rappellent que les étudiant.e.s et les universitaires ont du pouvoir. Tout au long de l’histoire, ils ont été à l’avant-garde des luttes politiques et sociales. Ils ont joué un rôle de catalyseur central dans la lutte pour un monde meilleur et plus juste.

Palestiniens et Juifs Unis souhaite célébrer ces réalisations et encourager les ambitions futures. Alors que les étudiant.e.s s’engagent dans cette lutte pour le changement, notre plus grande faiblesse, en tant que défenseurs des droits des Palestinien.ne.s, serait de ne pas connaître notre propre force et ce que nous pouvons faire pour encourager et construire davantage de solidarités. La réalité est que l’efficacité de nos voix dépend de notre capacité à concilier nos différences et à trouver une base commune pour agir. Notre force réside dans le nombre et ce, les institutions le savent.

Alors que la situation en Palestine devient de plus en plus désastreuse d’heure en heure, nous en tant qu’étudiant.e.s, enseignant.e.s, travailleurs et travailleuses, médecins, chauffeurs de bus, infirmières, propriétaires d’entreprises, musicien.ne.s, écrivain.ne.s et poètes, nous devons nous rappeler du dicton : «Quand les araignées s’unissent, elles peuvent attacher un lion.» Il est temps de s’unir. La Palestine vivra! La Palestine vaincra!

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