Le Canada ne parvient pas à respecter le droit international ni même à appliquer ses propres lois nationales pour s’opposer à l’annexion de Jérusalem-Est, malgré sa politique officielle de condamnation.
Le 20 août 2023, le gouvernement israélien a lancé un nouveau plan quinquennal de 3,2 milliards de shekels (2024-2028) pour développer Jérusalem-Est.
Sous prétexte de réduire les disparités sociales et économiques et d’accroître le développement économique à Jérusalem-Est, l’annonce du gouvernement israélien a également clairement indiqué que l’investissement équivalent à plus d’un milliard de dollars canadiens était axé sur le renforcement de la souveraineté israélienne sur la ville.
Le plan est une mise à jour du précédent plan quinquennal de 2 milliards de shekels (2018-2023). Ce plan visait également à renforcer la politique d’annexion et la soi-disant intégration des Palestiniens de Jérusalem dans la société israélienne.
Ce nouveau plan sera géré et mis en œuvre par le ministère des Affaires de Jérusalem et de la Tradition juive, avec des rapports annuels autour de la Journée de Jérusalem. Même le choix de la date de clôture annuelle est un affront. La Journée de Jérusalem est le jour où Israël célèbre la prise de Jérusalem-Est en 1967, en la célébrant par des marches de drapeaux provocatrices dans les quartiers palestiniens.
Renforcer le discours israélien
En annonçant ce plan, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a indiqué qu’il montre que le gouvernement israélien « répond aux besoins de tous les citoyens et résidents d’Israël et qu’il renforce notre politique au bénéfice d’une Jérusalem unie et forte, sous souveraineté israélienne».
En utilisant le mot « résident », Netanyahu fait référence à ceux qui résident à Jérusalem mais ne bénéficient pas de la citoyenneté israélienne.
Le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, faisant référence à « Jérusalem, notre capitale éternelle », a déclaré : « Je suis heureux de diriger le plus grand plan quinquennal pour Jérusalem-Est en tant que personne qui croit au renforcement de la souveraineté israélienne sur Jérusalem dans son ensemble. »
Le maire de Jérusalem, Moshe Lion, a déclaré que « la décision qui a été prise est une décision souveraine ».
Le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a indiqué que le gouvernement israélien a alloué 120 millions de shekels pour ce qu’il a appelé « le renforcement de la souveraineté sécuritaire à Jérusalem-Est ».
Il a indiqué qu’il s’agissait « d’une autre étape importante dans notre lutte incessante pour restaurer la sécurité personnelle à Jérusalem, notre capitale ».
Un plan pour opprimer les Palestiniens
Pour les Palestiniens, cela signifie que l’argent servira à accroître la surveillance, la militarisation, les commissariats de police et le personnel de sécurité, ainsi qu’à accroître l’isolement et la ségrégation raciale.
Cette réalité signifie « l’israélisation de tous les aspects de la vie et l’effacement de l’identité palestino-arabe de la ville de Jérusalem », déclare la Coalition civique pour les droits des Palestiniens à Jérusalem.
Ils ont poursuivi : « il y a toujours eu une nette différence entre Jérusalem-Est et Jérusalem-Ouest au cours des 56 années d’occupation de Jérusalem-Est ».
Des budgets, des programmes et des services ont été régulièrement consacrés à Jérusalem-Ouest et aux colonies israéliennes. Ils servent le développement des communautés et attirent davantage de colons. D’un autre côté, les quartiers palestiniens ont été délibérément négligés au cours des décennies d’occupation de la ville depuis 1967.
Même si les résidents palestiniens de Jérusalem-Est occupée paient des impôts à la municipalité, la qualité des services qu’ils reçoivent est bien inférieure à celle de Jérusalem-Ouest. Au-delà de cela, les autorités israéliennes procèdent régulièrement à des expulsions forcées de résidents palestiniens, s’emparant de leurs terres sous différents prétextes, notamment le soi-disant intérêt public et le développement de la ville et l’organisation juridique, la construction, la propriété des absents et d’autres lois.
L’éducation, les transports, au service de l’État israélien
L’éducation est un facteur clé dans l’annexion de la ville de Jérusalem. Un tiers du budget du nouveau plan quinquennal est consacré au renforcement du système éducatif israélien et de son programme dans les écoles palestiniennes de Jérusalem-Est.
L’éducation est considérée comme la principale porte d’entrée pour effacer le récit, l’histoire et l’identité nationale palestiniennes. Le gouvernement israélien intensifie ses efforts dans le cadre de ce qu’il appelle « réduire l’écart ».
Dans le même temps, le financement des infrastructures de transport prévu par le plan ne se concentrera probablement pas sur les communautés palestiniennes. Il s’agira plutôt de relier les colonies israéliennes entre elles, à travers un réseau de routes, de trains, de tunnels, de ponts et d’un train aérien. Cela permettra aux colons de pénétrer dans la ville.
La Coalition civique note que « ce plan vise, en fait, avant tout à satisfaire les intérêts et à protéger les colons et à accroître l’isolement et la ségrégation des quartiers arabes ».
Le silence du Canada
Jusqu’à présent, les responsables du gouvernement canadien sont restés silencieux sur ce nouveau plan. Mais ce n’est pas surprenant. Malgré la politique officielle du Canada selon laquelle il « ne reconnaît pas l’annexion unilatérale de Jérusalem-Est par Israël », il ne se soucie manifestement pas non plus de l’évolution des faits sur le terrain. Le Canada maintient que « le statut de Jérusalem ne peut être résolu que dans le cadre d’un règlement général du différend palestino-israélien ».
Cette attitude de non-intervention concernant Jérusalem n’est pas nouvelle. En fait, le premier vote du Canada contre une résolution des Nations Unies associée à la Palestine a eu lieu le 9 décembre 1949. La résolution proposait un régime international permanent pour la région de Jérusalem et la protection des lieux saints.
Cette tendance concernant Jérusalem est restée assez constante au cours des 75 dernières années. Par exemple, en 1981, le Canada s’est abstenu lors d’un vote de l’ONU concernant les fouilles israéliennes à Jérusalem-Est. La résolution indique que « les fouilles et les transformations du paysage et des sites historiques, culturels et religieux de Jérusalem constituent une violation flagrante des principes du droit international et des dispositions pertinentes de la Convention de Genève ».
En 1987, le Canada a voté non pour condamner « la décision d’Israël d’annexer Jérusalem et de la déclarer comme sa « capitale », ainsi que les mesures visant à modifier son caractère physique, sa composition démographique, sa structure institutionnelle et son statut. Plus récemment, en 2016 et 2017, le Canada s’est abstenu lors des votes de l’ONU sur le statut de Jérusalem.
Mais il est intéressant de noter qu’en 2018, l’année où les États-Unis ont transféré leur ambassade à Jérusalem, le Canada est revenu au vote non.
Les subventions du Canada aux organisations caritatives pro-israéliennes
Les organismes de bienfaisance canadiens continuent de fournir des fonds à des organisations comme Elad/Ir David qui utilisent une fausse archéologie et des fouilles délégitimées pour faire avancer un récit colonial – ces récits tentent d’effacer l’ancien héritage palestinien, musulman et non juif de Jérusalem.
Il y a eu environ une douzaine de plaintes récentes auprès de l’Agence du revenu du Canada au sujet des fonds étrangers subventionnés d’environ 100 millions de dollars qui ont été envoyés à diverses œuvres caritatives pro-israéliennes. Parmi elles figurent plusieurs organisations qui soutiennent l’annexion et la soi-disant « unification » de Jérusalem.
La position du Canada aux Nations Unies au cours des trois derniers quarts de siècle, tout comme sa tolérance à l’égard des contribuables canadiens qui subventionnent l’effacement de Jérusalem, révèlent son hypocrisie.
Malgré une politique qui condamne l’annexion de Jérusalem-Est, le Canada semble laisser les faits sur le terrain changer sans aucune réponse. Le Canada ne respecte pas le droit international ni même n’applique ses propres lois nationales telles que la Loi de l’impôt sur le revenu. En conséquence, les Canadiens soutiennent, par inadvertance, cet effacement de la Palestine.
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Nick Seebruch, rédacteur
Canada complicit with annexation of East Jerusalem – rabble.ca